REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
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Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

samedi 18 octobre 2014

LA BASILIQUE SAINT PIERRE à l'époque de la création du BALDAQUIN par LE BERNIN (fin)

Apres, l'érection de la grande coupole, il restait certes quelques travaux à effectuer (en particulier au niveau des coupoles de coin comme en témoigne la gravure représentant la basilique en 1593) cependant on pouvait penser que l'édifice, dans son essence,  était terminé. 

Pourtant,  il se produisit encore une nouvelle phase  de construction entre 1605 et 1617 sous la direction de Carlo Maderno.

 Elle se manifeste par deux aménagements principaux :
     . Le prolongement de la pseudo-nef de Michel-Ange en une véritable nef comportant trois travées.
     . La création de la façade monumentale donnant sur la place saint Pierre.

Les deux gravures ci-dessous d'Antonio Tempesta  montrent l'évolution de la basilique avant et après les travaux entrepris par Maderno

LA PROLONGATION DE LA NEF DE MICHEL-ANGE.
La décision de prolonger la basilique jusqu'à la place saint Pierre est due à deux motifs principaux :
   . En premier lieu, il convenait, pour terminer la nouvelle basilique, de détruire l'antique basilique du 4ème siècle. Or ce lieu avait été depuis longtemps consacré et il recelait de nombreux tombeaux en particulier dans les grottes qui se trouvaient en dessous : cet état de fait conduisit à la décision d'inclure cette partie de l'ancienne basilique dans la nouvelle en prolongeant cette dernière par une nef.
   . En ce début du 17eme siècle, les mentalités avaient changé : la contre-réforme catholique avait mis en œuvre un nouvel état d'esprit qui voulait d'une part témoigner de la puissance de Dieu et de celle de l'église et d'autre part, ébahir le fidèle par la somptuosité et le grandeur des églises. Or la croix grecque, construction trop raisonnable, était inappropriée à ce dessein, il fallait au contraire que le fidèle, dès l'entrée dans la basilique, soit impressionné par ce qu'il voyait et qu'il accomplisse un long cheminement, tant physique que mental, pour arriver à l'autel.  Seule la croix latine pouvait permettre ce cheminement.

Pour réaliser cette nef, Maderna utilisa, en une sorte de synthèse cohérente, toutes les structures existant à l'époque :
   . En premier lieu, il lui fallut coordonner la nouvelle construction avec celle de Michel-Ange de manière à constituer un ensemble cohérent : pilastres monumentaux terminés par des chapiteaux corinthiens portant la corniche, voûte en berceau à caissons : cette adéquation explique la grande harmonie de style de la basilique déjà mentionnée.
   . L'architecture d'ensemble s'inspire des églises du type de celle d'Alberti à Mantoue :
        - nef unique (1) tenue par des contreforts intérieurs (2).
        - pilastres doubles séparés par des niches (3)
        - arcades reliant ces pilastres. (4)
   . Pourtant Maderna va s'écarter de ce modèle Albertien d'abord en introduisant diverses modifications  :
        - présence de fenêtres hautes dans la voûte.
        - les contreforts intérieurs ont été percés d'arcades (6) formant un déambulatoire qui reconstitue une sorte de bas-côté.
        - le couvrement des espaces entre les contreforts intérieurs, comporte des coupoles (7) qui les éclairent de manière diffuse.
  . Enfin, la nef, étant de moindre largeur que l'édifice construit par Michel-Ange, Maderno décida de construire deux chapelles latérales de raccordement. (8)

LA FAÇADE MONUMENTALE
Beaucoup ont écrit que la façade de Maderno était une monstruosité, en particulier parce que, de la place, elle masquait le reste de la basilique et la coupole. Pour moi, c'est au contraire une grande réussite en ce sens qu'elle témoigne des mentalités qui présidèrent à sa construction.

Pour en mesurer le sens, il ne faut pas considérer cette façade simplement comme celle de la basilique, il s'agit beaucoup plus d'un somptueux décor qui évoque un palais ayant pour rôle premier de mettre en scène la puissance papale en magnifiant le souverain pontife en tant que successeur de Pierre. C'est dans cette perspective qu'il faut considérer la façade :

     (1)  au centre, la fenêtre où le pape apparaît pour la bénédiction "urbi et orbi", à la ville et au monde, cette fenêtre est établie à l'intersection des diagonales du rectangle formé par la façade.
     (2) autour de la fenêtre, quatre colonnes surmontées d'un fronton  évoquent un temple, ce qui renforce l'idée de la sacralisation du rôle du pape.
     (3) de part et d'autre, se trouvent les corps latéraux à colonnes qui se terminent sur deux tours  (4) encadrées de pilastres et surmontées, au dessus de l'attique, de frontons portant les horloges.(5)
     (6) enfin, au niveau de la balustrade se trouvent les statues du Christ, de saint Jean Baptiste et de onze apôtres. La statue du Christ se trouve au centre, juste en dessous de la fenêtre où paraît le pape : si on considère que la foule qui reçoit la bénédiction se trouve sur la place en contrebas, on voit apparaître nettement le rôle d'intercesseur du pape entre Jésus et le monde céleste d'une part et la foule personnifiant le monde terrestre d'autre part.

Toute cette façade est organisée pour sacraliser le pouvoir du pape, en ce sens c'est évidemment une réussite.

Certains ont regretté qu'il n'y ait eu jamais de clochers ; il y eut certes des projets émis mais ils ne furent jamais suivis d'effets. Pour moi, c'est heureux car la création de clochers aurait fait perdre totalement sa signification à cette façade devenue l'expression même du pouvoir papal.

La basilique est consacrée en 1626 par le pape Urbain VIII ; en 1620, le même pape a commandé à GIAN LORENZO BERNINI le baldaquin qui devait surmonter l'autel...

vendredi 17 octobre 2014

LA BASILIQUE SAINT PIERRE à l'époque de la création du BALDAQUIN par LE BERNIN (suite)

Le dessin ci-dessous, tiré du plan de Rome d'Etienne du Perac et daté de 1577, montre l'aspect que devait avoir la basilique saint Pierre au moment de la mort de Michel-Ange :
   . À l'arrière-plan, la nouvelle basilique, dont on aperçoit le tambour (1) devant porter la coupole.
   . En avant, l'ancienne basilique constantinienne qu'il est prévu de démolir une fois la nouvelle construction terminée, entre autre, par l'érection du dôme. (2)
   . En avant du portique de la basilique constantinienne, l'atrium de celle-ci.(3)
   . Enfin devant la façade de l'atrium, la place saint Pierre. (4)

LA CONSTRUCTION DU DÔME
la construction du dôme de saint Pierre et en particulier l'influence respective de Michel-Ange et de Giacomo Della Porta, chargé en 1685 par le pape Sixte V de mener à son terme l'édification de la basilique, est assez hypothétique.

Pour la construction de la coupole, Michel-Ange avait le choix entre deux types de formes :

La première était celle prévue par Bramante : c'est une coupole hémisphérique, imitée de celle du Panthéon de Rome, érigée sur un tambour à colonnes, devant être construite en tuf pour éviter le double inconvénient de cette forme de dôme : les risques d'affaissement de la partie centrale (d'autant qu'une lanterne terminale avait été prévue) et d'écartement des parois latérales qui en résulterait, ce qui nécessitait de très importantes structures de soutènement.

La deuxième était celle construite par Filippo Brunelleschi (1377-1446) pour le dôme de la cathédrale sainte Marie des Fleurs de Florence : il se caractérise par deux éléments novateurs :
     . Une forme de type hyperbolique dite de "chaînette" présentant cette étonnante particularité de sa structure autoportante : la stabilité de la coupole est assurée par son propre poids, ce qui fait qu'il n'existe aucun risque d'écartement des murs ; seul le poids de l'ensemble sur les piliers et arcades porteurs pourrait risquer de le faire écrouler. (1)
     . Une double calotte séparée par un vide, ce qui permet d'alléger le poids de l'ensemble.

Entre ces deux modèles quel était le choix de Michel-Ange ? On dispose, pour répondre à cette question qui divise encore les spécialistes, de deux documents :

Le premier est un dessin de Michel-Ange lui-même montrant une esquisse de ce que devait être le dôme par lui conçu : une coupole hémisphérique sur tambour comme dans le projet de Bramante. Les traits dessinés par l'artiste au niveau de la coupole semblent faire apparaître deux calottes quasiment concentriques.

Le second représente la maquette en bois réalisée à l'époque de Michel-Ange vers 1560 et sous sa direction pour la construction du dôme : cette maquette comporte deux coupoles séparées par un vide : une coupole interne hémisphérique et une coupole externe en chaînette. C'est cette dernière qui devait porter la lourde lanterne, agissant ainsi comme clé de voûte.

Cette maquette a suscité de nombreuses interrogations :
   . Michel-Ange, avait-il changé son projet juste avant sa mort en substituant à la coupole externe hémisphérique une coupole en chaînette ?
   . La maquette aurait-elle refaite par ses successeurs ? Dans cette hypothèse, ils auraient simplement surélevé la coupole extérieure de quelques mètres afin de lui donner sa forme ovoïde actuelle.

Quoiqu'il en soit, la coupole est terminée en 1590 sous la direction de Giacomo Della Porta et de Domenico Fontana qui éleva ensuite la lanterne.

Il va de soi que le dôme de saint-Pierre ne respectait pas la structure en "chaînette renversée" puisque la formule mathématique n'avait pas encore été inventée, ni celle de l'arc ogival utilisé par Brunelleschi : en conséquence, des fissures apparurent : le pape Benoît XIV (élu en 1740- mort en 1758) fit vérifier les coupoles par un physicien, ce dernier constata que l'architecture n'était pas en "chaînette renversée" et préconisa de poser de grands anneaux métalliques pour empêcher des dégradations ultérieures, ce qui fut fait.

À l'aube du 17eme siècle, on pouvait imaginer que la basilique, dans sa structure globale, était terminée, il y eut cependant une dernière phase de construction à partir de 1605 sous la direction de Carlo Maderno.

(1) De nombreuses suppositions ont été émises à propos de la coupole ovoïde de Brunelleschi qui aurait utilisé une structure mathématique dite de la "chaînette renversée". Cette forme est celle de la courbure formée par une corde (chaînette) que l'on tend entre deux bâtons sous l'effet de la pesanteur , il suffit d'observer la courbure d'un fil électrique dans la rue entre deux poteaux pour la remarquer. Si on retourne cette forme, on crée une "chaînette renversée" qui est, architecturalement parlant, une structure stable ne se déformant pas.

Brunelleschi aurait-il connu la formule mathématique de la "chaînette renversée" ? Évidemment non : cette formule mathématique n'a été trouvée qu'en 1691 conjointement par Leibniz, Bernouilli et Huygens. Dans ces conditions, comment Brunelleschi eut-il l'idée de construire ainsi ? En fait, Il ne s'est pas inspiré de spéculations mathématiques mais de ce qui existait à son époque, les arcs ogivaux des cathédrales ; la preuve en est que la coupole est composée de grands arcs de pierres qui évoquent justement les ogives.

Dans cette perspective, les avancées indéniables constatées lors de la création de la coupole se situent essentiellement au niveau des techniques : utilisation de rangées de briques en spirales inclinées vers l'axe central, utilisation de simple échafaudages au lieu de cintres de bois... 

jeudi 16 octobre 2014

LA BASILIQUE SAINT PIERRE à l'époque de la création du BALDAQUIN par LE BERNIN (suite)

La basilique Saint Pierre de Rome possède donc une structure d'ensemble inspirée par les conceptions stylistiques du Quattrocento. : coupole sur piliers massifs, voûtes en berceau à caissons, contreforts intérieurs soutenant la voûte, nef unique. 

À partir de cet héritage, va s'établir une construction en trois phases principales.

LES PERIODES DE BRAMANTE ET DE MICHEL-ANGE
La première phase est celle de BRAMANTE sous le pontificat de JULES II. Elle dure de 1506 à 1514, date de la mort de Bramante. Celui-ci emporta le concours organisé pour le choix de l'architecte en présentant le plan de base représenté ci-dessous :
     . Au centre la coupole (1) construite sur tambour et portée par quatre piliers massifs (2)
     . Autour de la coupole, quatre bras (3) de même taille forment un plan en forme de croix grecque.
     . Chaque bras se termine par une abside (4) qui fait saillie sur la forme carrée de la basilique.
     . Entre les bras de la croix, l'espace est rempli par quatre coupoles secondaires (5) plus basses puis par quatre clochers (6) afin de constituer la forme carrée.
Ce plan carré à cinq coupoles évoque à la fois l'art byzantin et aussi la basilique saint-Marc de Venise.

La construction fut entreprise avec, en premier lieu, érection des piliers destinés à porter la coupole.

De 1514 à 1547, le chantier subit une période de latence : tandis que les piliers s'élèvent et que se succèdent les architectes (dont Raphaël), se pose la question de la modification du plan primitif et de la forme de croix grecque : celle-ci semblant trop liée aux conceptions antiques, il conviendrait de revenir à la croix latine, plus conforme aux traditions chrétiennes, c'est dans cette perspective qu'est établi un plan par Raphaël avec seulement trois absides, la quatrième étant remplacée par la nef.

En 1547. À la prière du pape PAUL III, MICHEL-ANGE accepte d'assurer la direction des travaux. Il les conduira jusqu'à sa mort (1564). Michel-Ange reprend le plan de BRAMANTE mais y ajoute divers correctifs :
   . En premier lieu, il simplifie l'ensemble, épure la forme et supprime les clochers de coins.
   . Les murs extérieurs sont renforcés avec utilisation de pilastres séparant les hauteurs de fenêtres.
   . les quatre bras de la croix sont conservés mais réduits d'une travée,
   . De part et d'autre des piliers portant la coupole, de grandes arcades (7) sont construits afin de soutenir les piliers pour les empêcher de s'écarter sous le poids de la voûte.
   . Surtout, est créée une pseudo-nef (8) qui constitue un semblant de croix latine en noyant l'abside occidentale dans un mur rectiligne de façade. En avant de la façade est prévue un double portique à colonnade (8)

À la mort de Michel-Ange, les murs de l'église sont terminés ainsi que le tambour de la coupole ; il restait à construire cette dernière.

A quoi pouvait ressembler la basilique conçue par Michel-Ange ? On dispose de deux dessins réalisés par Étienne Du Peron datant de 1569  et représentant saint Pierre de Rome telle que Michel-Ange l'aurait conçue. Ces deux dessins n'ont pas été réalisés uniquement sur l'existant  puisque le Dôme n'avait pas été construit, ils ont dû être complétés grâce à la maquette que Michel-Ange avait réalisée pour ce dôme. Selon Du Perac, ils représentent le dernier état des plans de l'architecte.

Ces deux dessins représentent la façade latérale :
1- les absides terminant les bras de la croix
2- piliers soutenant la coupole
3- coupoles de coin
4- coupole centrale
5- tambour
6- double portique en avant de la façade ouest.

Sur le dessin de droite, on remarque que le dôme est composé de deux coupoles emboitées l'une dans l'autre, cette particularité sera évoquée dans la troisième et avant-dernière partie concernant la construction de la basilique Saint-Pierre de Rome.

mardi 14 octobre 2014

LA BASILIQUE SAINT PIERRE à l'époque de la création du BALDAQUIN par LE BERNIN. 

Au moment où le pape Urbain VIII commande le baldaquin de Saint Pierre à GIAN LORENZO BERNINI en 1624,  la basilique saint  Pierre de Rome n'est terminée que depuis quelques années seulement et n'est pas encore consacrée (elle le sera seulement en 1626).

En contemplant l'intérieur de l'édifice, on est saisi à la fois par le gigantisme de l'ensemble, par sa somptuosité,  par l'unité de style et  l'harmonie architecturale qui s'en dégage, comme si, à première vue, la basilique avait été construite d'un seul jet et par le même concepteur.

Ce ne fut cependant pas le cas :
   . D'abord, parce que la construction s'étala dans le temps : commencée sous le pontificat de Jules II en 1506, elle se poursuivit jusqu'au premier tiers du 17eme siècle, soit pendant plus de cent ans. Pendant cette longue période, de nombreux événements se produisirent qui firent évoluer le style architectural italien : le triomphe de l'art de la renaissance, puis l'éclosion de l'art nouveau de la contre-réforme catholique après le choc de la réforme luthérienne. Cependant, ces évolutions, si elles influèrent l'architecture de Saint-Pierre en modifiant en particulier le plan de la basilique, n'eurent que peu d'effets sur son organisation d'ensemble.
   . Ensuite, parce qu'alternèrent des périodes d'intenses activités de construction suivies par d'autres pendant laquelle l'érection de la nouvelle basilique fut mise en sommeil, soit parceque les papes eurent d'autres préoccupations, soit à cause du manque de moyens financiers (1)
   . Enfin, par le fait que les papes confièrent la direction des travaux à des artistes renommés qui, chacun, présentèrent des aménagements du plan primitif, voire même des plans nouveaux ; ils ne restèrent cependant qu'à l'état de projets. En fait, trois seulement de ces artistes comptèrent dans la conception de saint Pierre de Rome : Bramante, Michel-Ange et Maderno.

Si ces diverses contingences n'ont guère influées sur l'aspect intérieur de saint Pierre de Rome, c'est que l'unité architecture n'a pas été inventée ex-nihilo pour la basilique : elle est en réalité héritée des concepts mis en œuvre par le Quattrocento (15eme siècle italien).

L'UNITÉ STYLISTIQUE DE SAINT PIERRE DE ROME, UN HÉRITAGE DU QUATTROCENTO.
la théorisation de l'architecture de la Renaissance qui servit de base à la basilique saint Pierre de Rome et à la plupart des églises des 16eme et 17eme siècle a été effectuée par les humanistes du 15eme siècle et en particulier par Léon Baptista Alberti (1404-1472) à partir de deux éléments :
   -  la redécouverte de l'héritage antique et de ce qu'il en subsistait à Rome avec en particulier le Panthéon surmonté de sa coupole à caissons, les voûtes en berceau des ruines romaines dont celles des thermes, les arcs de triomphe...
   - une réflexion quasiment philosophique sur "l'art d'édifier" (De re aedificatoria, livre posthume d'Alberti) avec :
          . recherche théorique au moyen des mathématiques des proportions idéales sur le modèle de l'harmonie des accords musicaux, découverte de la perspective à partir d'un point de fuite...
          . Mise en application de la construction mentale qui résulte de cette recherche aux contingences matérielles du matériel à employer, du site, du sol, de la région... avec donc convergence de la forme (construction abstraite et idéalisée) à la matière selon les préceptes aristotéliciens.

Alberti va mettre en application ces théories dans une de ses œuvres majeures, la co-cathédrale saint André de Mantoue : il concevra cette église mais mourra avant la fin des travaux, la coupole ne sera réalisée qu'en 1490-95. Sur les deux illustrations qui suivent, seront mentionnées les caractéristiques qui inspireront les églises construites postérieurement et en particulier saint Pierre de Rome.

Il s'agit d'une église à nef unique (alors que les églises médiévales possédaient deux bas-côtés)  en forme de croix latine. A la croisée du transept se trouve une coupole (1), elle est portée par quatre piliers de forme carrée (2) qui soutiennent de puissantes arcades (3) sur lesquelles est construite la coupole. Ces arcades constituent la naissance des quatre voûtes en berceau  ornées de caissons qui recouvrent la nef (4), les deux bras du transept (5) et le chœur (6).

Cette structure avec coupole centrale et voûtes en berceau sur les quatre bras de la croix sera une des constantes de l'architecture  baroque.

Le problème qui se pose avec une telle structure est, bien évidemment,  le poids de la voûte et les risques d'écartement de ces voûtes  ; à l'époque médiévale, on aurait construit d'épais contreforts qui aurait porté des arcs-boutants ; ce n'est pas ici le cas. Une autre forme de soutènement est apparue, celle des contreforts intérieurs (7) : ce sont d'épais murs qui vont s'élever de part et d'autre de la nef pour supporter la voûte.

Ces murs seraient disgracieux s'ils n'étaient pas masqués : ils se terminent au niveau de la nef par des pilastres (8) qui supportent une corniche à  entablement (9). En outre, pour renforcer ces piliers en les arrimant l'un à l'autre, ont été créé des voûtes en berceau à axe perpendiculaire au sens de la nef (10)) qui permettent de constituer des chapelles latérales (11) ; enfin, entre chaque contrefort, se trouve un espace fermé  servant, entre autre, de puits de lumière (12).

Ces contreforts intérieurs terminés par des pilastres qui constituent des chapelles latérales seront une autre caractéristique des églises baroques. 

Les théories d'Alberti et ses réalisations vont constituer la référence pour la construction de Saint Pierre de Rome.

(1) c'est, rappelons-le, à cause de ce manque de moyens financiers que le pape Léon X mis en vente des indulgences, ce qui conduisit Luther à afficher ses 96 propositions sur la porte de l'église de Wittenberg, et aboutit à la naissance du protestantisme.

mardi 7 octobre 2014

IMPRESSIONS DE CURES THERMALES (13)

LE COÛT DES CURES

la troisième allégation mentionnée dans l'introduction sur le thermalisme était le fait que les cures thermales coûtent cher à l'assurance maladie. Pour tenter de répondre à cette impression partagée par beaucoup de gens, je prendrai, comme précédemment, l'exemple des pathologies concernant l'arthrose. Pour cela, j'essaierai de comparer le coût des cures thermales par référence aux traitements classiques médicamenteux et à l'acupuncture.

En ce qui concerne l'importance des pathologies concernant l'arthrose, voici deux textes trouvés sur internet :

Texte commentant l'Étude COART France
" Les coûts directs de l'arthrose représentaient en 2002 plus de 1,6 milliard d'euros, soit environ 1,7 % des dépenses de l'assurance maladie. La moitié de ces dépenses était attribuable à la prise en charge hospitalière, avec plus de 800 millions d'euros. 13 millions de consultations ont été effectués annuellement et les coûts des prescriptions médicamenteuses ont représenté 570 millions d'euros. La progression des coûts médicaux directs par rapport à 1993 (+156 %) s'explique essentiellement par la croissance du nombre de patients traités (+54 %), le coût par patient s'étant accru de 2,5 % par an." (les conséquences socio-économiques de l'arthrose en France.)

Texte de "l'Association Française de Lutte Anti-Rhumatismale" 
     . " Une étude, présentée au congrès international de l’arthrose à Barcelone de cette année, montre que le coût annuel de prise en charge d’un patient par médecin généraliste est de 755 euros en 2010. Le coût direct du traitement de l’arthrose par an s’élèverait donc à 3 milliards d’euros.
     . En France, l’arthrose touche de 9 à 10 millions de personnes, soit 17 % de la population. En dix ans, entre 1993 et 2003, l’augmentation des patients atteints a été de 54 %.
     . Très peu savent qu’elle est la seconde cause d’invalidité dans notre pays : pour de nombreux patients, il s’agit d’un véritable handicap. L’arthrose a été responsable de 5 millions d’arrêts de travail en dix ans (1993-2003). Cela a un coût : il s’élevait à 1,6 milliards d’euros en 2002, dernière année pour laquelle nous disposons d’une évaluation précise. Il est estimé aujourd’hui à 3 milliards d’euros par an.
"

Deux chiffres émanant de ces enquêtes devraient permettre d'effectuer les comparaisons souhaitées :
     . 9 à 10 millions de personnes souffrent de l'arthrose
     . La prise en charge annuelle d'un patient par le généraliste est de 755€ en 2010. Cependant, ce dernier chiffre me semble exagéré car le texte reproduit ci-dessus mentionne 9 millions de personnes pour un coût de 1,6 milliards d'Euros, cela ne représente que 177 euros par patient !

En ce qui concerne les cures thermales :
     . Elles concernent 362.000 personnes en 2007 soit un très faible pourcentage des personnes souffrant d'arthrose ( 4%).
     . Le coût d'une cure revient pour la sécurité sociale à 476,56€, comme le montre le tableau reproduit en annexe qui représente un cas réel de 2014 (1) : Ainsi, une cure thermale coûte moins cher que ce qui est mentionné dans le texte de " l'Association Française de Lutte Anti-Rhumatismale" mais beaucoup plus que le chiffre calculé sur la base des coûts rapportés au nombre de malades.

En ce qui concerne l'acupuncture, selon mon expérience, il me faut renouveler les séances d'acupuncture au minimum tous les trois mois à raison de trois séances à chaque fois. La séance d'acupuncture effectuée dans un cabinet médical revenant à 18€, cela représente 140€ avec un remboursement de 89€ par l'assurance maladie.

Au vu de ces chiffres, il apparaît nettement que l'acupuncture est la pratique la moins coûteuse pour le soulagement de l'arthrose, cependant, à mon grand regret, cette médecine reste largement marginale.

Entre cure thermale et soins médicamenteux, quel est celui qui est le moins coûteux ? Les chiffres cités plus haut sur le coût par patient de la prise en charge de l'arthrose par les traitements médicamenteux sont trop disparates pour être fiables. Pourtant, les moyens informatiques auraient dû permettre de réaliser des statistiques précises, mais je n'en ai pas trouvé.

Si, en conclusion, on fait le bilan de ces articles consacrés aux cures thermales, on ne peux que constater notre impuissance à répondre clairement et simplement aux questions posées en introduction : pour le faire, il faudrait deux informations qui, semble-t'il, n'existent pas  :
   . L'étude scientifique comparée des bienfaits thérapeutiques des cures thermales, des traitements médicamenteux et des autres médecines dites douces.
   . Le coût comparé par patient d'un traitement médicamenteux, d'une cure thermale et des soins par les autres médecines.

Sans ces outils de base, on ne pourra émettre que des avis subjectifs sans les assortir d'aucune preuve.

(1) le coût d'une cure thermale RHumatisme en 2014 :

lundi 6 octobre 2014

IMPRESSIONS DE CURE THERMALE (12)

 LE CAS PARTICULIER DES CURES DESTINÉES À LUTTER CONTRE L'OBESITE. 

Les cures effectuées au titre de la lutte contre l'obésité ont été étudiées dans une enquête spécifique de l'AFRETh, appelée MAATHERMES, elle est  plus statistique que scientifique.

 "Cette étude a été effectuée sur deux groupes de personnes :
     - Le groupe cure : 120 patients, reçus dans 5 stations thermales pendant 3 semaines pour suivre le traitement thermal spécifique pour  l’obésité.
      - Le groupe témoin : 157 patients, accompagnés par leur médecin généraliste dans un suivi contre le surpoids et l’obésité. "

Selon cette enquête, la perte de poids est beaucoup plus importante pour les curistes que pour ceux qui ont suivi "un programme de modification de style de vie et un  traitement médicamenteux"

" Les résultats de l'étude MAATHERMES sont d'autant plus pertinents que la cure nécessite une période d'intervention très inférieure aux programmes habituels de modifications de style de vie (16 à 26 semaines), et n'entraîne aucun effet secondaire indésirable." (Citation de l'enquête)

Pourtant cette même étude, donnant l'avis de médecins, semble considérablement minorer le rôle de l'eau thermale. Pour eux, la cure est surtout l'occasion d'une prise en charge globale de l'obèse. Ils effectuent pour le montrer six types d'observations :

La durée de la cure (trois semaines) permet aux gens de se couper de leurs habitudes, de leurs activités habituelles génératrices de stress et d'impression d'être continuellement  débordé, ce qui induit grignotage et "malbouffe" ; en cure, on vit pour soi-même, on n'a d'autres préoccupations que sa santé, on est pris en charge pour le reste.

La cure est aussi l'occasion d'effectuer des exercices physiques : les villes thermales organisent des activités de toute sorte pour les curistes, ceux-ci peuvent accomplir de nombreux sports (cyclisme, marche gymnastique...) ainsi que des activités de type relaxation.
 
Les cures s'accompagnent aussi de conseils diététiques sur les besoins en calories de chacun établis par des diététiciennes selon l'âge, le poids, les habitudes de vie.. ainsi que sur les équilibres alimentaires. Pour chaque curiste est rédigé un programme nutritionnel précis et détaillé effectué à partir de leur vécu. De même, des conférences sont organisées pour montrer les risques de l'obésité et les nombreuses pathologies qui en découlent (maladies cardio-vasculaire, arthrose...)

Dans les villes thermales ayant mis en place des programmes minceur, la prise en charge des curistes s'étend jusque dans les hôtels qui servent un menu diététique à 1400 kcl : le temps assez long de la cure permet aux organismes des curistes de s'habituer à ce rythme nouveau d'alimentation qui constatent que l'on peut manger de tout mais raisonnablement.

les conclusions des médecins insistent aussi sur le côté psychologique de la cure, les gens qui y viennent sont souvent perturbés par leur obésité, ils en ont honte et, de ce fait, se retranchent de la vie sociale ; pendant la cure, ils se retrouvent entre obèses, ce qui leur permet d'établir des contacts avec des personnes qui leur ressemblent ; chacun peut alors partager son problème de sur-poids et confronter son point de vue avec ceux des autres.

Ainsi, pour ces médecins, la cure est essentiellement la rééducation des habitudes comportementales même si l'eau thermale y a sa part à la fois par son action mécanique (l'eau chaude contribue à la fonte de la graisse, les jets permettent de masser) et chimique. (l'eau ingurgitée permet de drainer le fois et a un effet anorexique qui diminue la boulimie)

Enfin, les médecins qui témoignent dans MAATHERMES indiquent explicitement que la cure thermale est un "starter"  et non une fin en soi : il est nécessaire que tous les comportements acquis lors de la cure soient poursuivis. Cela n'est rarement le cas comme je l'ai écris précédemment, le retour à la maison s'accompagne généralement du retour aux habitudes et pratiques quotidiennes antérieures à la cure ; peu à peu, on en revient à tous les errements qui avaient conduit à l'obésité : nourriture trop riche et trop abondante, absence d'activités physiques, incitations continuelles de la société de consommation en ce qui concerne la nourriture... Bref, en peu de temps, les effets de la cure risquent d'être obérés et les bonnes résolutions oubliées.

Si on veut éviter cet échec, il est nécessaire que les cures d'amaigrissement soient assorties d'un suivi médical à la fois parce que les régimes, généralement déséquilibrés, peuvent avoir des résultats nocifs à long terme en créant des carences, et surtout parce qu'il est nécessaire d'accompagner les efforts des malades pour empêcher qu'ils ne renoncent. Dans cette perspective, il faudrait que les médecins refusent de prescrire de telles cures médicalisées si les patients ne font pas les efforts qu'on leur demande .

Il convient cependant de relativiser les affirmations qui précédent :
   . Les prises en charge par la sécurité sociale sont limitées aux cas les plus graves d'obésité : cela est perceptible quand on considère le pourcentage des curistes ressortant des différents agréments : 73% pour les prescriptions de cures RH, 11% pour le soin des Voies Respiratoires et 5% pour le secteur " affections digestives et urinaires" qui englobent non seulement l'obésité mais aussi toute sorte d'autres pathologies.
   . En fait, une grande partie des cures destinées à l'amaigrissement ne sont pas prises en charge, elles font partie d'une troisième catégorie de pratiques thermales qui sont à mi-chemin entre les cures de bien-être et les cures médicalisées. Ces cures, dont la durée est fixée par le curiste lui-même, ne sont pas remboursées par la sécurité sociale et donc sont effectuées en toute liberté par les gens qui choisissent de les suivre.


dimanche 5 octobre 2014

IMPRESSIONS DE CURE THERMALE (11)

LE BILAN
Ainsi, il apparaît, au terme de cette description des avantages et des réserves émises à propos des cures thermales, une double impression :

Il y a d'abord ce ressenti de beaucoup de curistes que j'ai tenté de faire passer du subjectif à un maximum d'objectivité en essayant d'étayer mon impression par des informations glanées autour de moi et sur les sites scientifiques trouvés sur internet :
   . En premier lieu, une cure à base de soins thermaux soulage la douleur liée à l'arthrose et aux problèmes d'articulation,
   . L'effet de la cure est double, à la fois chimique et mécanique, soignant et rééduquant, les deux aspects revêtant une égale importance,
   . Les effets de la cure sont durables, ils permettent de se passer de médicaments.
   . L'eau thermale étant naturelle, elle ne produit aucun effet secondaire.

En ce qui concerne les réserves émises, elles correspondent à ce que l'on peut constater dans la société toute entière :
   . Beaucoup de gens affirment péremptoirement des convictions qui ne sont étayées par aucune preuve scientifique. En ce qui concerne les cures thermales, c'est tout à fait net puisque les études menées n'en sont qu'à leurs balbutiements et sont largement orientées par leurs initiateurs qui avancent de pseudo-preuves pour justifier leurs propos. . En fait, il semble bien que personne ne semble vouloir que la vérité s'exprime, de trop importants intérêts financiers sont en jeu !
   . À cela s'ajoute le laxisme généralisé de toute la société : beaucoup de curistes considèrent la cure comme une période de vacances, c'est du moins ce qui transparaît dans les médias. Ce comportement est cependant réel : il dérive du détestable principe : " je fais ce que je veux" qui a développé l'individualisme forcené.

Comment peut-on sortir de cette situation ?
Pour moi, il faudrait mettre en œuvre trois éléments :
   . Faire réaliser par la sécurité sociale une étude sur les bénéfices apportés aux gens souffrant de diverses pathologies par les cures thermales mais aussi par l'acupuncture, l'homéopathie, les traitements médicamenteux... de manière à voir ce qui est le plus profitable et le moins nocif à la santé. Cette enquête devrait être menée par les scientifiques indépendants et n'ayant pas manifesté ni d'a-priori ni de conflits d'intérêts. Une fois cette enquête terminée, l'assurance maladie pourra décider en toute connaissance de cause ce qu'elle rembourse ou pas. Avec un tel outil, on cesserait de proférer des balivernes qui embrouillent tout le monde.
   . Modifier la méthodologie de la prescription des cures : si un patient, quelques semaines après la cure, revient consulter son medecin et indique qu'il souffre à nouveau et qu'il a besoin à nouveau de médicaments, le médecin en conclura que la cure n'a pas eu l'effet escompté et qu'il est inutile de lui en prescrire l'année suivante.
   . Inclure dans les études de médecine l'apprentissage des médecines dites douces et en particulier des soins thermaux, afin que les praticiens généralistes puisse prescrire des cures en toute connaissance de cause. (cf : TOUS MALADES, TOUS SOIGNÉS dans ce blog)

C'est à ce prix que l'on pourra mettre un peu d'ordre et de raison dans des polémiques sur les cures thermales qui ne devraient pas avoir lieu d'être.

samedi 4 octobre 2014

IMPRESSIONS DE CURE THERMALE (10)

LES RÉSERVES CONCERNANT LES PRATIQUES THERMALES

La première réserve émise par le corps médical concerne les critères d'agréments : alors que les médicaments font l'objet de longues procédures de certification et ne sont mis sur le marché qu'une fois le cursus complet accompli, les soins thermaux ne font pas l'objet d'enquête sur leur efficacité : les responsables des thermes semblent dire :  " à quoi bon évaluer nos pratiques puisque les cures ont prouvé leur efficacité depuis les romains et sans doute avant encore " il est probable que ces responsables ont peur des conclusions de telles évaluations qui risqueraient de ne pas être en leur faveur.

Pressés par l'Etat et par les menaces de déremboursement, les stations thermales décidèrent de se constituer en un groupe appelé CNETh (Conseil National des Exploitants Thermaux) et de créer une structure de recherche appelée AFRETH (agence française pour la recherche thermale). celle-ci mît en œuvre deux enquêtes :
      . THERMARTHROSE parue en 2005 pour répondre aux détracteurs des cures thermales en RHumatologie qui justifiaient leur opposition à la prise en charge par la sécurité sociale de ces cures par le fait qu'aucune étude n'avait jamais été entreprise sur leur efficacité. (1)
     . MAATHERMES à propos de l'obésité.
Il va de soit que ces enquêtes sont très favorables aux cures thermales puisqu'elles ont été menées par le CNETh qui, dans cette affaire, fut juge et partie. C'est pourquoi je n'en donnerai les conclusions qu'en note jointe.

En attendant qu'une vraie enquête, effectuée par une structure indépendante, puisse être organisée, il parait évident que toutes les supputations pourront continuer à circuler.

Une seconde réserve est aussi à noter : le choix du lieu de cure par les patients est, le plus souvent, déterminé plus par l'environnement que par la qualité des eaux et des soins. On préfère faire une cure dans le sud de la France, même si l'eau de telle ville thermale située dans un site moins agréable, serait plus efficace. C'est, en ce sens, que la cure s'assimile à des vacances dans les motivations de certains. Autrefois, la sécurité sociale ne remboursait les soins que si l'on choisissait le lieu de cure le plus proche de son domicile. Ce n'est malheureusement plus le cas.

Autre réserve, il suffit de regarder les gens lors des cures pour observer que la plupart tentent de faire des efforts pendant la cure, participant à des conférences, marchant, faisant du sport... Par contre, sitôt la cure terminée, ils abandonnent tous ces efforts, retombent dans leur quotidien et s'empressent d'oublier tout ce qu'ils avaient pris de résolutions pendant la cure. C'est le cas en particulier pour les cures luttant contre le surpoids et l'obésité dont je parlerai dans l'avant dernier article de ce chapitre. On a souvent l'impression que, pour beaucoup de gens, les trois semaines de cure sont un intermède agréable dont on s'empresse d'oublier les enseignements sitôt revenu chez soi.

La quatrième réserve concerne les agréments dispensés par l'assurance maladie. Certes, ils sont basés sur des critères objectifs : pureté de l'eau, qualité constante de ses composantes, analyse de ces composantes, température de l'eau... Pourtant, on peut se demander si, à ces critères objectifs, ne s'en ajoutent pas d'autres, moins scientifiques : on peut, par exemple, être étonné que deux stations proches l'une de l'autre, avec de l'eau à la composition semblable, soient agréées pour l'une au titre des soins en rhumatologie et l'autre pas ; renseignements pris, l'une de ces stations comporte une source où l'eau sourd à 21°, ce qui permet cet agrément en rhumatologie et l'autre pas ; pourtant, dans les deux stations, l'eau doit être réchauffée à 36° avant de servir pour les soins, ce qui annihile la différenciation entre les deux eaux ! En conséquence, la première station fait le plein de curistes et refuse même du monde faute de places alors que la station voisine est si peu fréquentée qu'elle est menacée de fermeture. Il est probable que d'autres considérations que la qualité de l'eau sont entrées en ligne de compte !

Une autre réserve consiste à la nécessité pour les curistes de tenir compte de contingences matérielles qui limitent la pratique  :
    . Une cure durant trois semaines, il faut pouvoir disposer de ce laps de temps pour l'effectuer, ce qui n'est pas toujours le cas pour les actifs.
    . Une cure, même prise en charge par la sécurité sociale, coûte cher, surtout si on vient de loin, il faut en effet se loger (le meublé le moins cher que j'ai trouvé à Vittel est de 480€ pour les trois semaines) et payer les frais annexes (dont les abonnements aux activités par exemple).
Tout cela limite la clientèle qui comporte surtout des personnes âgées à la retraite disposant de temps et d'assez de moyens pour payer tous les à-côtés : dans cette perspective, on ne peut pas dire que la démocratisation touche ce domaine de soins ! (même si la sécurité sociale prend en charge une partie des frais d'hébergement pour les plus démunis)

Enfin, une dernière réserve pourrait être émise, je la cite pour mémoire : l'intérêt économique. Pour défendre les cures thermales, cet argument est souvent employé : il faut maintenir les cures thermales non parce qu'elle sont utiles mais pour préserver les emplois et permettre aux collectivités locales de rentabiliser les investissements imposés par l'Etat au nom de normes si draconiennes qu'elles en deviennent stupides :   si la sécurité sociale supprimait les remboursements des cures thermales, les villes d'eau seraient totalement ruinées (selon le CNEth, les remboursements des cures par la sécurité sociale représente 74% du chiffre d'affaire des stations thermales. C'est dire l'importance des intérêts en jeu ! )

Pour moi, cet argument n'est pas à prendre en compte dans une politique de santé publique pour trois raisons au moins :
     - avec de tels arguments de préservation de l'emploi, on peut justifier n'importe quoi : si on tente de limiter l'alcoolisme, on nuit gravement aux viticulteurs et à l'emploi agricole, si on limite les autorisations de fumer, les usines cigaretières vont fermer, ce qui créera du chômage...
     - délivrer des agréments sous prétexte de maintenir l'emploi revient à faire financer ces emplois par les cotisants sociaux et par les contribuables, sans bien entendu le leur dire, ce qui est immoral.
     - surtout, avec de tels arguments économiques, on obère totalement le problème essentiel, celui de la santé publique.

Dans cette perspective, on retrouve toutes les perversions occasionnées par le " fric" : les personnes qui défendent l'emploi dans un tel contexte ne se servent de cet argument que pour préserver leurs propres intérêts et ceux de leurs actionnaires. Ils utilisent l'alibi du chômage  pour forcer la main à l'Etat et maintenir leurs privilèges. Ils se sont groupés en de puissants groupes de pression pour cela. En ce sens, l'intérêt du curiste est relégué au second plan.

1- L'enquete Thermarthrose
L'enquête porte sur 462 patients répartis en 2 groupes d’études :

     . Le groupe cure : 232 patients, accueillis dans 3 stations thermales ont reçu, en complément de leur traitement habituel, des soins thermo-minéraux pendant 18 jours.
     . Le groupe témoin : 230 patients ont suivi leur traitement habituel.


Les chiffres sont, dans cette enquête, éloquents : selon les patients, comme selon les médecins, la situation a été améliorée pour plus de 50% des curistes et seulement pour 30% des autres. La suite de l'enquête montre que cette amélioration n'est pas que ponctuelle mais se poursuit sur les mois qui suivent : " A 6 mois, on observe, de manière statistiquement significative une amélioration du score de la douleur de 11,4 chez les patients du groupe curiste et de 4,0 chez les patients du groupe témoin. L’amélioration du score d’incapacité est également significatif : il est de 8,5 pour les patients du groupe curiste et de 3,0 pour les patients du groupe témoin." 

vendredi 3 octobre 2014

IMPRESSIONS DE CURE THERMALE (9)

LES BIENFAITS CONCERNANT LES CURES THERMALES

À partir du moment où les substances contenues dans l'eau thermale rejoignent la circulation sanguine, il devient difficile, sinon impossible dans l'état actuel des connaissances,  de mesurer postérieurement leur action, cela est vrai pour l'eau thermale mais aussi pour tous les médicaments et autres méthodes de soin.

On ne peut donc aller plus loin dans la description de l'impact des cures thermales sur le corps humain. Néanmoins, à partir de la connaissance de l'eau thermale et de ses voies d' utilisation, il est possible d'effectuer des comparaisons avec les autres méthodes de soin.

En préalable à ces comparaisons, il convient d'abord de rappeler qu'on ne sait pas actuellement soigner l'arthrose,  on peut simplement soulager la douleur en permettant aux malades d'améliorer leurs conditions quotidienne et de tenter de mener une vie normale.

En premier lieu, il convient de tenter de placer les cures thermales dans les deux types de pratiques médicales existantes :
   . L'homéopathie et l'acupuncture qui procèdent des mêmes méthodes de soin : on sollicite le corps pour qu'il trouve en lui-même la réaction qui diminue la douleur :
         - l'homéopathie en créant des symptômes semblables à ceux de la maladie sans que l'on soit effectivement malade.
         - l'acupuncture en suscitant la réaction du corps au moyen d'aiguilles piquées dans les zones douloureuses. (1)
   . Les médicaments chimiques, à l'inverse, ne font pas appel aux réactions au corps lui-même. Le but du médicament est que son principe actif arrive à son lieu d'intervention et agisse directement sur les cellules. (2)

Où se placent les cures thermales ? L'eau conduit-elle le corps à réagir positivement face à la douleur comme le fait l'homéopathie ou agit-elle comme les médicaments ? En ce qui me concerne, au vu de mon expérience, je serais tenté de classer les cures thermales dans la première catégorie.

Cure thermale ou médicament chimique : entre les deux voies d'action, comment choisir ? L'alternative est de la libre appréciation de chacun (où plutôt de l'avis du médecin traitant qui prodigue ses conseils à-priori selon ses convictions plus subjectives que réelles). Selon moi, ce choix peut être guidé par plusieurs types de considérations :

   - d'abord, les eaux thermales ne comportent que des substances existant naturellement dans le corps et pour lesquelles il peut se produire des carences qui pourraient expliquer certaines pathologies ; il n'y a aucun risque d'effets secondaires à l'exception des fatigues passagères déjà signalées et de possibilités de surdosage au niveau de l'ingestion de l'eau.
   - à l'inverse, les médicaments "chimiques" conduisent à des effets secondaires qui peuvent être particulièrement dangereux : c'est le cas en particulier des médicaments utilisant la molecule de diclofenac comme principe actif qui induisent généralement des maux d'estomac pour lesquels il est nécessaire de prendre des médicaments de complément, (3)
   - une autre considération est aussi à noter : alors que la cure thermale prend en compte les deux volets d'action, la rééducation par l'eau des articulations et le passage dans le corps de substances naturelles destinées à atténuer la douleur, le médicament n'agit que pour atténuer la douleur en la rendant supportable, c'est ensuite à chacun de se prendre en charge pour marcher et se mouvoir !
   - enfin, selon mon expérience, les bienfaits de la cure thermale durent longtemps, d'une année sur l'autre en ce qui me concerne et sans médicaments : par contre, un médicament nécessite des prises régulières.

Cette efficacité,  je peux aussi la prouver au moyen de mon expérience personnelle : jusqu'à l'âge de 7 ans, je subissais sans cesse des bronchites à répétition, ainsi que des rhumes et des angines. Aucun médicament me faisant de l'effet, le médecin de famille m'envoya en cure à La Bourboule pendant trois ans consécutifs. Je fus placé dans une de ces maisons qui accueillaient les enfants car mes parents n'avaient pas les moyens de rester à La Bourboule pendant les trois semaines que duraient ma cure. Mon père venait me conduire et ma mère me rechercher ou vice-versa. Je faisais partie de ces enfants qui marchaient en rang dans les rues de la ville, la tête emmitouflée dans des serviettes blanches. J'eus droit à toute sorte de soins, des bains qui duraient si longtemps que je croyais que l'on m'avait oublié, des inhalations... Apres ces trois cures à La Bourboule, je fus totalement guéri, je n'ai plus jamais eu une bronchite, ni même un rhume, ni une angine, bien entendu, je ne pris plus de médicaments. Cette guérison, je la dois à cette cure thermale.

Ces considérations positives sur les cures thermales doivent être cependant nuancées : je faillirais à mon souhait d'objectivité si je n'indiquais pas les nombreuses réserves que l'on trouve d'ailleurs citées un peu partout.

1- l'acupuncture à un rôle encore mal défini et diverses versions de ses modes opératoires existent chez les spécialistes qui tentent d'expliquer son effet bénéfique par la voie de la biochimie : l'application d'aiguilles stimulerait les terminaisons nerveuses dans les tissus, les informations induites par ces stimulations seraient transmises au niveau de la moelle épinière à des neurones spécifiques qui libèrent des endorphines, (sorte de morphine endogène suscitées par le corps) qui bloquent les messages de douleur des tissus enflammés ou blessés,

2- supprimer la sensation de douleur revient, pour les médicaments anti-douleur, à annihiler la production de prostaglandines qui agissent sur le cerveau pour signaler un dysfonctionnement. Le blocage de la douleur s'effectue non par des voies naturelles mais par l'action du principe actif du médicamant

3-en outre, le 22 août 2013, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) contre-indique le diclofénac « chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque avérée, de cardiopathie ischémique, d’artériopathie périphérique et/ou de maladie vasculaire cérébrale » et recommande que le traitement ne soit instauré qu'« après une évaluation du rapport bénéfice/risque chez les patients présentant des facteurs de risque cardiovasculaires (hypertension artérielle, hyperlipidémie, diabète sucré et tabagisme) » 

jeudi 2 octobre 2014

IMPRESSIONS DE CURE THERMALE (8)

LES SOINS : L'EXEMPLE DE L'ARTHROSE
Je prendrai ici l'exemple des soins apportées dans le cadre de l'orientation RH (1) :

Ceux-ci se répartissent en trois catégories :
   . Les soins au moyen de l'eau seule :
       . Exercices en piscine de type kinésithérapie,
       . Bains bouillonnants,
       . Douches au jet,
       . Douches sous immersion,
    . Les soins associant l'eau à d'autres produits :
       . Illustration avec mélange de boue et d'eau thermale,
       . Douches térébenthinées,
   . Les massages sous l'eau par un kinésithérapeute.

Entre ces différents soins, c'est le médecin thermal qui choisit les trois soins journaliers en fonction des pathologies constatées.

Comment, à partir de ces soins essentiellement externes, peut-on obtenir un soulagement de la douleur occasionnée par l'arthrose ? Selon ce que j'ai pu lire et entendre, il existe deux actions possibles de l'eau thermale :
   . Un effet mécanique,
   . Un effet chimique.

En ce qui concerne l'action mécanique, elle parait évidente : on peut la montrer à partir de deux exemples :

Lors des soins de kinésithérapie en piscine thermale, il apparaît un phénomène de portance de l'eau qui, selon les études que j'ai pu lire, supprime 80% du poids réel. Or l'arthrose consiste en une dégénérescence du cartilage enrobant l'extrémité des os et sa destruction avec, parallèlement, prolifération osseuse sous le cartilage. Il en résulte des douleurs lors du mouvement puisque les os frottent l'un contre l'autre. Cette douleur est augmentée si l'articulation supporte le poids du corps comme c'est le cas pour le genou surtout en cas d'obésité de la personne. Plutôt que de souffrir, beaucoup limitent leurs mouvements à l'indispensable. Dans l'eau, la portance de l'eau diminuant le poids sur l'articulation, ce qui n'était plus possible à l'air libre le redevient dans l'eau. Lors de la kinésithérapie dans l'eau, les malades réussissent à refaire des mouvements oubliés et qu'ils croyaient impossibles à réaliser : ils retrouvent un peu la mobilité de leurs articulations ankylosées. Ainsi les exercices dans l'eau thermale s'apparentent à une rééducation.

Le deuxième exemple est celui des bains bouillonnants : ils s'effectuent dans une piscine d'eau thermale portée à 36°, des jets dits " toniques"  sont projetés dans l'eau aux endroits où se développe l'arthrose, passant  successivement sur les chevilles, puis sur les genoux, les hanches, le dos, les épaules et les cervicales. Ces jets effectuent un massage complet des articulations.

Ainsi se définit clairement les effets mécaniques de la cure : il s'agit de tenter d'assouplir les articulations pour leur permettre de fonctionner à nouveau. Il se pose alors une question : celle de savoir si de tels effets nécessitent de l'eau thermale ? Ne pourrait-on pas obtenir le même résultat chez soi ou dans une piscine avec de l'eau du robinet ?

D'après ce que l'on m'a dit, si on effectue un soin avec de l'eau normale, l'effet mécanique sera le même qu'avec de l'eau thermale ; par contre l'effet chimique se se produira pas, ce qui ôtera à la cure la moitié de son efficacité.

Je me suis permis de demander à la responsable des cures de Vittel si les effets chimiques de l'eau thermale avaient été déjà étudiés, elle m'a répondu par l'affirmative au moyen de deux arguments :
   . Des comparaisons de soins ont été effectués avec de l'eau normale et de l'eau thermale : une amélioration significative n'a été constatée que pour les personnes ayant été soignées avec de l'eau thermale.
   . Lors des cures, beaucoup de gens se plaignent que, pendant la deuxième semaine, ils subissent une grande fatigue et sentent que leur douleur ne se calment pas et même s'accroissent : selon la responsable des cures, c'est normal car il faut que l'organisme s'adapte aux effets chimiques de la cure ; ensuite, pendant la troisième semaine, ces douleurs disparaissent.

Voici ce qu'elle m'a ensuite expliqué : l'eau thermale est portée à 36° ; cette chaleur permet de surchauffer la zone à traiter de telle sorte que les substances actives contenues dans la boue ou dans l'eau traversent la barrière cutanée dilatée par la chaleur. Il va se produire alors un échange avec pénétration dans le corps des ions du calcium et du sulfate et évacuation des déchets métaboliques. La chaleur de l'eau permet d'augmenter le mécanisme d'échange de 1 à 10. Passés les vaisseaux périphériques, les ions de l'eau thermale accèdent à la circulation sanguine.

À cette double action mécanique et chimique de l'eau thermale dispensée lors des soins s'ajoute le fait que les curistes sont amenés à boire de l'eau minérale distribuée au moyen de griffons dans tout l'établissement. Cette ingestion complète l'effet de l'eau thermale qui pénètre alors dans la circulation sanguine via l'estomac.

Ainsi apparaît trois effets de l'eau thermale :
   . Un effet mécanique qui permet d'assouplir les articulations ankylosées par l'arthrose.
   . Un effet chimique résultant de deux types de pénétration des ions de l'eau thermale dans le corps :
           . Par ingestion d'eau,
           . Par les vaisseaux sanguins de la peau.

(1) En France, 12 orientations thérapeutiques ont été définies par la sécurité sociale pour les cures thermales :
          . RH : Rhumatologie et séquelles de traumatismes ostéo-articulaires
          . VR : Maladies des voies respiratoires
          . MCA : Maladies cardio-vasculaires
          . AU : Maladies de l'appareil urinaire et maladies métaboliques
          . AD : Maladies de l'appareil digestif et maladies métaboliques
          . PHL : Phlébologie
          . GYN : Gynécologie
          . DER : Dermatologie
          . AMB : Affections des muqueuses bucco-linguales
          . NEU : Neurologie
          . PSY : Thérapeutique des affections psycho-somatiques
          . TDE : Troubles du développement chez l'enfant

mercredi 1 octobre 2014

IMPRESSIONS DE CURE THERMALE (7)

SUITE DE L'ARTICLE PRÉCÉDENT

LES CARACTÉRISTIQUES DES EAUX SELON LEUR COMPOSITION
Les eaux minérales et thermales proviennent de strates aquifères différentes; c'est pourquoi elles n'ont pas la même composition : le tableau ci-dessous montre les caractéristiques de trois sources minérales mises en bouteilles (Hepar et Grande Source pour Vittel, Contrexeville) et de l'eau thermale de la source Félicie utilisée pour les soins aux thermes de Vittel.

Au niveau du tableau, sont mentionnés les anions (-) et les cations (+) qui sont des ions séparés naturellement dans l'eau .

Cette différenciation entre les eaux thermales a conduit à établir une classification de leurs caractéristiques :

les eaux sont d'abord classées selon la quantité de sels minéraux qu'elles contiennent et réparties selon les anions prédominants :
               - bicarbonatées sodiques. (HCO3- et CO3--) ou calciques.
               - sulfurées calciques (S--  et SH-) ou sodiques.
               - sulfatées calciques (SO4--) ou sodique.
               - chlorurées sodiques (Cl-)

À ces catégories s'ajoutent les eaux à minéralisation spéciale comportant arsenic, cuivre, ou fer.

D'autres différenciations particulières apparaissent par ailleurs :
  . Selon la température à laquelle sourdent les sources, chaudes ou froides,
  . Selon ou non que les sources sont accompagnées de gaz, qui peuvent être aussi utilisés dans le cadre des soins,
  . Selon la minéralisation mesurée après évaporation de l'eau pour l'étude du résidu à sec.
          - les eaux faiblement minéralisées : moins de 500 mg de minéraux par litre.
          - les eaux moyennement minéralisées : entre 500 et 1500 mg/l que l'on peut aussi consommer fréquemment, comme par exemple Vittel.
          - les eaux fortement minéralisées : plus de 1500 mg/litre de minéraux. Elles ne sont pas à consommer quotidiennement mais lors d'un déficit de minéraux dans l'organisme. Parmi celles-ci, Hépar, Contrex.

Chaque eau possède donc sa spécificité même si elle est produite dans la même zone géographique.

L'UTILISATION DE L'EAU THERMALE POUR LES SOINS À VITTEL
pour les soins dans les thermes de Vittel est utilisée l'eau de la source Félicie: elle possède, comme il est mentionné dans le tableau trois caractéristiques principales :
    - elle est à la limite de la forte minéralisation,
    - de par sa composition. Elle est de type mixte : sulfatée calcique et chlorurée sodique,
    - c'est une eau froide mais elle sera chauffée à 36° pour les soins.

Il reste maintenant à connaître comment les éléments contenus dans l'eau utilisée aux thermes peuvent agir sur l'organisme.

À SUIVRE. 

mardi 30 septembre 2014

IMPRESSIONS DE CURE THERMALE (6)

SUITE DE L'ARTICLE PRÉCÉDENT
LES EAUX THERMALES

Le premier schéma montre la manière dont se constitue l'eau thermalo-minérale.

Pour que l'on obtienne une eau thermale, il faut d'abord qu'existe un ensemble géologique composé :
   -  d'une strate aquifère (roche poreuse ou fissurée capable de contenir une nappe d'eau) comportant un pendage assez important,
  - de deux couches imperméables qui la cernent de part et d'autre : celle du dessus est appelée le toit (couverture), celle du dessous,  le mur.

1- strate aquifère,
la strate aquifère se charge au moyen de l'eau de pluie (3 à 10%) et par les infiltrations des lits des rivières. Ensuite, l'eau circule lentement dans la couche aquifère et se charge en sels minéraux émanant de la roche. Cette eau est à une pression supérieure à la pression atmosphérique, ce qui explique qu'elle ait tendance à remonter vers le sol.
2- roche imperméable dit "du toit".
3- roche imperméable dit "du mur".
4- niveau piézométrique, défini comme le niveau le plus haut atteint naturellement par l'eau si on effectue un forage jusqu'à la nappe aquifère : ce niveau s'établit selon la méthode des vases communicants.
5- nappe dite captive : l'eau accède au niveau piézométrique mais il faut une pompe pour qu'elle arrive au sol.
6- nappe captive débouchant à un niveau du sol inférieur au niveau piézométrique : elle prend la forme d'un puits artésien

Il n'est pas toujours besoin de forages pour que cette eau arrive à l'air libre naturellement : elle peut remonter par capillarité jusqu'au sol en profitant des fissures et failles de la roche du toit et forme alors de petites mares, c'est comme cela que de nombreuses sources thermales furent découvertes.

Tout cela paraît très simple, pourtant la situation est souvent beaucoup plus complexe que ce qui précède. Pour le montrer, je vais reprendre l'exemple des eaux de Vittel.

Sur la coupe géologique simplifiée de direction NO-SE de Vittel, sont représentées :
    . Les couches géologiques surmontant le socle de granite vosgien, elles sont toutes de l'époque du Trias (première époque de l'ère mésozoïque ou ère secondaire), les couleurs employées permettent de différencier les strates aquifères et les strates imperméables,
   . La faille de Vittel et les failles adjacentes,
   . Les gîtes des eaux thermales :
           - gîte A dans les dolomies du Muschelkalk supérieur,
           - gîte B dans les calcaires à entroques et les dolomies des Muschelkalk supérieur et moyen,
           - gîte C dans les grès.
   . La localisation des sources mises en bouteilles (traits verticaux bleus). Elles résultent toutes de forages à l'exception d'une des sources du Gîte A qui s'écoulait naturellement sur le sol en petites mares ; c'est d'ailleurs une de ces mares qui fut à l'origine de la station de Vittel quand Jean Bouloumié, venu à Contrexéville pour se soigner de coliques néphrétiques, la découvrit, en étudia l'action et se soigna. Au vu de l'amélioration de son état, il fit l'acquisition du terrain pour y fonder une station thermale.

De cette structure géologique découle la nature des eaux thermales (utilisées dans les thermes pour les soins) et minérales (consommées en boisson)

À SUIVRE.

lundi 29 septembre 2014

IMPRESSIONS DE CURE THERMALE (5)

SUITE DE L'ARTICLE PRÉCÉDENT

La deuxième allégation que l'on entend souvent concernant les cures thermales est qu'elles ne servent à rien, qu'elles ne sont aptes ni à guérir ni même à soulager les maux.

Cette allégation soulève une question très complexe à plusieurs points de vue :

   . D'abord, pour s'informer convenablement, il faudrait trouver une documentation objective ; cela est très difficile tant les positions des tenants des cures et de leurs adversaires sont éloignées et que chacun est convaincu d'avoir raison.

   . Ensuite, parce que les mécanismes d'action des eaux thermales et des médicaments dans le corps et dans la circulation sanguine sont à peine connus : on peut suivre à peu près correctement  la manière dont le médicament ou l'eau thermale passent dans la circulation sanguine ; par contre, après, on se trouve en terre quasiment inconnue.

   . En conséquence, le niveau d'efficacité tant des médicaments que des eaux thermales ne peut être mesuré que par des contrôles à-posteriori :
           - pour les médicaments, la méthode est bien connue : essais sur des personnes volontaires  qui acceptent de tester de nouveaux "principes actifs"  puis comparaison statistique des résultats obtenus avec ceux des molécules déjà mises sur le marché afin de déterminer si la nouvelle molécule est plus efficace que les anciennes et si elle a moins d'effets secondaires nocifs.
          - pour les cures thermales, le niveau d'efficacité est beaucoup plus difficile à mesurer : on ne peut le faire que par des études statistiques effectuées auprès de personnes ayant suivi une cure thermale ou auprès des médecins qui les soignent  sur l'évolution survenue de leur état de santé. Bien évidemment, il y a de gros risques de subjectivité dans les réponses données qui peuvent largement obérer le sérieux de ces analyses.

Avant de se résoudre à utiliser ces ressources statistiques, il convient  pour mieux les comprendre, de définir ce qu'est une eau thermale et de déterminer de la manière dont cette eau peut soigner. Pour cela, il faut faire appel à des notions de géologie, d'hydrologie et de chimie...

À SUIVRE.

dimanche 28 septembre 2014

IMPRESSIONS DE CURE THERMALE (4)

SUITE DE L'ARTICLE PRÉCÉDENT

Pour se rendre compte de ce dualisme entre soins et loisirs, il suffit d'entrer dans un établissement de thermes et en particulier à Vittel, établissement que je connais bien.

Passé le grand hall d'accueil, on va d'abord chercher son peignoir afin de se mettre en tenue de curiste. Ensuite un fléchage conduit soit aux soins, là où se déroulent les cures médicalisées, soit aux zones de détente et de loisirs qualifiés ici de "Thermal Spa". Le sigle affiché par le Thermal Spa est tout un programme : " forme et beauté"

Ce secteur du Spa est essentiellement fréquenté par des gens venus de l'extérieur et ayant pris un forfait de quelques jours ou d'un week-end. Dans cet endroit, l'eau thermale n'a qu'une très faible part dans les activités proposées, on ne la trouve que dans la piscine pourvue de jets et dans les jacuzzi ; toutes les autres activités n'ont rien à voir avec les pratiques thermales : outre les habituels sauna et Hammam, on trouve diverses formes de douches relaxantes et parfumées ainsi que de nombreuses cabines de massage qui permettent de se régénérer (1) (ou plutôt, selon moi, de se ravaler). Le prix élevé de ces pseudo-soins détermine la clientèle qui peut y prétendre.

On voit ces curistes arriver le samedi, tous en pleine forme, bronzés, venant passer un moment agréable. Pour eux, ce lien avec l'eau thermale qui servait d'alibi à la bonne société d'antan pour fréquenter les villes thermales,n'existe pas ; on pourrait d'ailleurs installer ce type de Spa n'importe où, sans lien avec de l'eau thermale, on y trouverait les mêmes massages, les mêmes activités et sans doute la même ambiance.

De l'autre côté du Thermal Spa se trouvent les installations de soins, là la clientèle est totalement différente : c'est un patchwork de gens abîmés par la vie ou par les excès commis antérieurement qui essaient de retrouver une meilleure santé : on y côtoie une majorité de personnes âgées, souvent des femmes, en surpoids et même obèses, marchant parfois avec des cannes, qui souffrent d'arthrose, de rhumatismes, et subissent toutes les pathologies liées à l'âge. il y a aussi des gens qui tentent d'atténuer, par la cure, les séquelles d'accidents subis. C'est une humanité souffrante qui peine à marcher, à monter les escaliers... Leurs conversations ne portent que sur leurs maux, chacun raconte ses maladies et tous expriment l'impression que la cure les fatigue mais leur fait du bien et atténue leur douleur.

Cette clientèle n'est pas fortunée, elle ne fréquente pas les grands hôtels ; les gens qui habitent loin trouvent des pensions de famille ou de petits hôtels tout simples pour les héberger pendant leurs trois semaines de cure, d'autres rentrent chez eux les soirs ; certains même s'installent sur les terrains de camping ou à l'hôpital (en cas d'obésité nécessitant un suivi constant avec nécessité de repas diététiques) (2)

Alors que le Thermal Spa est moyennement fréquenté,  cette partie des thermes fonctionne à plein, pratiquement toute la journée ; il y a même des semaines où les thermes affichent complet, c'est dire la confiance que les gens ont dans ces soins spécifiques.

Ainsi les cures thermales ne sont ni fréquentés par des nantis, ni par des gens venus en vacances, elles le sont par des malades qui espèrent, par l'eau, atténuer leurs maux.

À SUIVRE

(1) L'un de ces massages, " le Peel resufaçant, une peau plus nette comme rénovée après un soin seulement", témoigne du genre de clientèle qui fréquente ce Thermal Spa, des gens attirés par la mode de ce stupide sabir mélangeant mot anglais et mot français dénaturés et dont le "snobisme" confine au ridicule ! (J'ai cherché la signification du mot Peel, j'ai trouvé épluchure)

(2) indépendamment de ces remarques concernant les cures, je voudrais ajouter que,dans cette partie des thermes, les employés sont d'une gentillesse surprenante, les malades ne sont jamais traités comme des pions ou des numéros, on les appelle par leur nom et on les respecte. Le personnel est aussi aux petits soins pour eux, toujours de bonne humeur et soucieux de rendre service pour permettre à chacun d'accomplir sa cure dans les meilleures conditions possibles. Il se crée alors entre les malades et les employés une complicité qui donne envie de continuer à lutter contre la maladie. 

samedi 27 septembre 2014

IMPRESSIONS DE CURE THERMALE (3)

suite de l'article précédent

La vie mondaine ayant déserté les villes thermales, les grands hôtels sont soit en ruines, soit ont été démolis, soit ont été reconvertis :
   . à Contrexeville par exemple, beaucoup  ont été transformés en appartements et vendus par lots, un hôtel est devenu un lycée hôtelier, un autre accueille actuellement la mairie...
   . À Vittel, les hôtels les plus prestigieux ont été rachetés par une société privée de loisirs qui offre à ses clients toute une gamme d'activités (golf par exemple) sans aucun rapport avec le thermalisme, un autre hôtel est devenu l'hôpital local, un autre la mairie...

Les ruines du principal hôtel de MARTIGNY LES BAINS dans les Vosges témoignent de cette dégradation. : le grand hôtel de l'établissement a été amputé d'un étage puis abandonné, il n'en subsiste que les murs qui menacent de s'écrouler.

Les casinos existent toujours mais ils accueillent surtout une clientèle venue des villes avoisinantes, par contre, autant que j'ai pu le constater, on n'y voit guère de curistes.

De même beaucoup des villas construites à l'époque de la splendeur des villes d'eaux sont fermées et se dégradent lentement et sûrement.

Sous les pavillons où jaillissent les sources, toute vie conviviale et mondaine a pratiquement disparu, les gens viennent, pour beaucoup, remplir les bouteilles d'eau de leur consommation quotidienne.

Les thermes menacés de fermeture ont du s'adapter pour survivre. Elles le firent au moyen d'une double mutation de leurs clientèle :

      . elles se mirent à soigner les malades en faisant reconnaître la qualité de leurs eaux par les services publics afin de se faire agréer par la sécurité sociale pour traiter certaines pathologies. Cet agrément, est un double sésame :
           - il est communiqué aux médecins qui peuvent prescrite une cure de trois semaines adaptée à chaque malade,
           - il permet aux malades de demander une prise en charge de la cure par la sécurité sociale, ce qui ouvrit la pratique des cures à toutes les couches de la société.

     . À côté de cela fut conservé un secteur destiné à une clientèle riche de gens bien-portants, venus uniquement par souci de remise en forme, de bien être, de loisirs et de paraître. Bien évidemment, ce secteur n'est pas pris en charge ni par la sécurité sociale ni par les mutuelles ; sont-ils les héritiers de la bonne société qui venaient aux eaux au 19ème siècle? Absolument pas, car la notion de soins thermaux n'entre aucunement dans leur motivation.
À SUIVRE

vendredi 26 septembre 2014

IMPRESSIONS DE CURE THERMALE (2)

Je commencerai cette série d'articles par la dernière allégation, celle qui assimile curiste et nantis venus en cure pour passer des vacances. C'est d'ailleurs la plus facile à démolir car elle se réfère à une situation qui a disparu depuis presque cent ans.

L'utilisation de l'eau thermale remonte sans doute à la nuit des temps. Cependant  la mode des cures se développa principalement au 19ème siècle, selon moi, grâce à Napoléon III qui souffrant de ce qu'on appelait alors la maladie de la Pierre, cherchait désespérément une eau thermale qui pourrait l'apaiser. La présence de l'empereur dans les villes thermales suscita la venue de la bonne société qui prit coutume de " venir aux eaux".

Selon Ambroise Bouloumié, fils du fondateur des thermes de Vittel et son continuateur, la journée d'un curiste en 1875 se déroule comme suit : " le buveur se lève entre cinq et sept heures, descend aux sources et boit ses verres d'eau tous les quarts d'heure.. Le dernier verre est pris à 9 heures afin de pouvoir déjeuner à 10 heures. Après déjeuner, chacun dépouille sa correspondance et y répond, on lit les journaux, fait la sieste, va à la salle de jeu...

À trois heures, l'animation dans le parc recommence, le traitement reprend ses droits, il consiste à boire quelques verres d'eau. Après le dîner, une promenade d'une heure environ soit sur la terrasse du parc, soit en ville, précède généralement l'entrée dans les salons pour le théâtre, le bal.  À onze heures au plus tard, toutes les lumières sont éteintes."


Comme on le constate à la lecture de ce texte, les cures consistent essentiellement à boire de l'eau thermale.

Pour accueillir leur riche clientèle, les villes d'eaux s'équipèrent : les petites cabanes qui surmontaient les sources se muèrent en de magnifiques pavillons souvent grandioses. Sous ces pavillons somptueux, les curistes se rassemblaient pour boire l'eau chaque jour mais aussi pour discuter et se retrouver entre gens de la bonne société. Les pavillons de source devinrent le lieu par excellence de la sociabilité des villes d'eau de la "belle époque"

Tout autour des thermes , sont construits de beaux hôtels pour accueillir la riche clientèle qui vient parfois avec ses domestiques. Ce sont des édifices imposants pourvus d'une façade construite sur ossature métallique recouvert d'un parement de pierres ayant des allures néoclassiques ou éclectiques et dont l'architecture est à la mesure des clients qu'ils accueillent. Certains habitués  se firent même construire de belles villas entourées de parcs dont la magnificence tranchait singulièrement avec l'habitat traditionnel des autochtones.

De même, entre les prises d'eau, il fallait permettre aux curistes de mener la vie à laquelle ils étaient habitués, les villes thermales s'équipèrent dans cette perspective : grands parcs généralement à l'anglaise, hippodrome, kiosque à musique où se produisaient les harmonies locales ou les fanfares militaires, galeries servant de promenoir bordées de boutiques de luxe, stand de tir.... et surtout casino où se trouvaient outre des salles de jeux, des salons, des fumoirs, des bars, des salles de bal  et même des théâtres.

Aller actuellement en cure pour retrouver cette vie mondaine est impossible car elle a totalement disparu, au moins dans les stations thermales où je me suis rendu, depuis la première moitié du 20ème siècle.

jeudi 25 septembre 2014

IMPRESSIONS DE  CURE THERMALE (1)

Quand on annonce à quelqu'un que l'on part en cure thermale pour trois semaines, on constate généralement chez ses interlocuteurs trois types  de réactions : 

   . La plus constante est l'incrédulité : à quoi cela sert-il d'aller en cure ? La plupart des gens estiment en effet que seule la médecine chimique des laboratoires pharmaceutiques est efficace ; cette idée, également colportée par beaucoup de médecins, concerne non seulement les cures thermales mais aussi toutes les sortes de médecines qui sortent du moule  : acupuncture, homéopathie, ostéopathie..

   . Cette incrédulité se mue quasiment en colère quand ils apprennent que les cures thermales sont prises partiellement en charge par la sécurité sociale et par les mutuelles : ils prétendent que cela augmente encore plus le déficit de l'assurance maladie.

   . Enfin pour beaucoup de gens, une cure thermale est le fait de nantis, qui utilisent le prétexte des cures pour passer un séjour agréable dans un environnement dominé par les loisirs.

Bref, si j'associe tous ces lieux communs, je peux formuler l'aphorisme suivant : " un curiste est quelqu'un qui, sous prétexte de soins inutiles, prend des vacances aux frais de la sécurité sociale".

j'essaierai dans les articles qui vont suivre de donner mon témoignage à propos de ces accusations en le basant sur l'expérience que j'en ai...

mercredi 24 septembre 2014

LE SYSTÈME SERE DE RIVIÈRES  : LE FORT DE DOUAUMONT

Le plan présenté du fort de Douaumont montre bien l'unicité des structures des forts Séré de Rivières modifiés puisqu'on retrouve la même organisation que celle du fort d'Uxegney avec son tracé de fossé en polygone et son casernement enterré. 

Le plan ci-dessous présente néanmoins quelques différences par rapport à celui d'Uxegney :
  . L'entrée protégée par un coffre double située de part et d'autre de celle-ci,
  . La présence d'un sous-sol qui comporte, entre autre les citernes, essentielles en cas de siège prolongé,
  . La présence d'une rue circulaire tantôt à ciel ouvert, tantôt en galerie qui fait le tour du casernement et dessert les galeries menant aux coffres de contre-escarpe, aux tourelles et aux guérites.

1- coffre double de contre-escarpe,
2- coffre simple,
3- tourelle de 75 avec son observatoire,
4- tourelles de mitrailleuse et leurs observatoires,
5- casemates de Bourges,
6- entrée et casemates défensives de l'entrée,
7- casernement.
8- tourelle Galopin de 155,
9- chemin reliant entre elles toutes les parties du fort,
10- traverses-abris pour les munitions et pour les troupes,
11- parapet d'infanterie.

Les parties du casernement colorées en mauve correspondent au sous-sol avec citernes, divers magasins ainsi que quelques chambrées pouvant être utilisées en temps de guerre

Le dessin et la photo qui suivent montrent, à gauche, une reconstitution possible du fort et à droite, le fort en 1916  au moment où les français le reconquièrent le 24 octobre 1916 après sept mois d'occupation allemande.

Il convient de rappeler que, par le décret du 5 août 1915, il fut décidé le désarmement des forts. Cette décision fut inspirée  par le général Joffre pour au moins deux raisons :
   . Dans la nouvelle forme de guerre apparue depuis la fin de 1914, les forts ne servent plus à rien, en plus, ils monopolisent des moyens en hommes, matériel et armement qui seraient beaucoup plus utiles ailleurs.
   . La prise du fort de Manonvillers, proche de Lunéville a montré que les forts sont vulnérables et qu'il faut mieux ne pas compter sur leur efficacité.

En conséquence, le fort de Douaumont  fut vidé de tout son armement à l'exception des tourelles des canons de 155 et de 75 trop difficiles à démonter ; le fort qui pouvait accueillir de 500 à 800 hommes, fut laissé à une petite garnison. Celle-ci ne pût résister à l'attaque que les allemands lancèrent le 15 février 1916, ces derniers occupèrent le fort jusqu'à la reconquête effectuée par les français le 24 octobre .

Sur la photo aérienne, chaque cône renversé représente un cratère d'obus. Pourtant, malgré ce déluge de feu, des hommes ont continué à vivre dans la forteresse.  C'est dire la qualité et la solidité des forts du système Séré de Rivières !


mardi 23 septembre 2014

LE SYSTÈME SERE DE RIVIÈRES : LA PLACE-FORTE DE VERDUN.

La création de la place forte de Verdun dans le cadre de la fortification des frontières consécutive à la défaite de 1870, fut décidée à la fin de l'année 1873. Verdun se trouve située dans la vallée de la Meuse qui s'encaisse dans le revers de la côte calcaire. De part et d'autre de la vallée se trouvent donc des zones en surplomb qui constituent des sites idéaux pour la construction de forts. Le général Seré de Rivières prévoit la construction de 13 forts formant ceinture autour de la ville qui comporte déjà une citadelle construite à l'époque de Louis XIV.

Tandis que les travaux de terrassement commencent, une alerte en 1874-75 fait imaginer une attaque imminente de l'Allemagne, cinq redoutes sont construites en urgence dans l'entourage immédiat de la cité, elles sont dites "redoutes de la panique" ; complétées ensuite et qualifiées de forts, elles serviront de ceinture défensive intérieure mais ne présenteront guère d'intérêts stratégiques.

Les travaux s'échelonnent de 1875 à 1885 avec construction des treize forts prévus, que j'ai qualifié de "première génération".

La crise de "l'obus torpille" va conduire à la modernisation de la place-forte avec, dans un premier temps :
   . Le transfert des canons des forts dans 42 batteries d'artillerie  et 28 magasins d'armement.
   . La création du chemin de fer à voie étroite pour relier les forts. les ouvrages échelonnés sur la ceinture et la citadelle.
   . Le premier réaménagement des forts : protection des casernes par du béton spécial, remplacement des caponnières par des coffres de contrescarpe,
   . La construction de nouveaux forts dans les intervalles des anciens : les forts ayant désormais pour rôle dominant la protection des flanquements afin d'interdire à l'ennemi la traversée de la ceinture fortifiée, il faut qu'ils soient assez rapprochés l'un de l'autre, ce qui explique ces constructions nouvelles.

À partir de 1900 se produit la deuxième phase d'aménagement avec :
   - l'emploi du béton armé,
   - la construction de 46 tourelles à éclipse, de 23 casemates de flanquement (casemates de Bourges armées de canons de 75) et de 47 observatoires cuirassés. ..
 
Ces modifications furent menées dans la quasi totalité des forts de la ceinture extérieure, cela explique l'inexpugnabilité de la place forte qui sera manifeste lors de la bataille de Verdun.

lundi 22 septembre 2014

LE SYSTÈME SERE DE RIVIÈRES : un fort modernisé : UXEGNEY

Le fort d'Uxegney faisait partie de la place forte d'Epinal (voir les articles précédents consacrés au système Seré de Rivières) . Il a été construit de 1882 à 1884 antérieurement à la "crise de l'obus torpille" et il fut modernisé à partir de 1892 ; en 1914, cette modernisation qui n'était pas encore terminée, fut interrompue par la guerre.

L'étude des plans de ce fort permet de mesurer l'évolution survenue entre la première construction et sa modernisation.

Le premier fort comporte les éléments habituels à toutes les constructions du système Séré de Rivières : il est quasiment dissimulé sous un remblai de terre de protection, seuls apparaissent à l'air libre, les fossés, les deux cours ainsi que les façades des casernements des officiers de part et d'autre de la porte d'entrée, les façades des caponnières, des traverses-abris et les façades des bâtiments enterrés donnant sur la cour (dont les façades des chambrées des hommes de troupes) .

Le dessin ci-dessous présente la structure enterrée :
   1- infirmerie,
   2- commandant du fort,
   3- logement des officiers et mess,
   4- citerne,
   5.6- cuisines et réserves,
   7- magasin à poudre et casemates servant à l'armement (magasins et ateliers),
   8- chambrées des hommes de troupe et des sous-officiers,
   9- escaliers permettant de gagner les traverse-abris et les postes d'artillerie,
 11- caponnières,
 12- galeries reliant les caponnières à la partie centrale du fort.

Il existe aussi un télégraphe situé dans le tunnel d'accès de la porte à la cour.

Le deuxième plan représente les modifications du fort d'Uxegney dans le cadre de la modernisation qui s'est, comme ailleurs, déroulé en deux phases :
   . La première période est celle du béton spécial, de la création du chemin de fer aux voies de 60 et du transfert de l'artillerie et des magasins dans les intervalles.
   . La deuxième est celle des grands aménagements pour le réarmement.

1- deux des trois caponnières sont remplacées par des coffres de contrescarpe, l'un double, l'autre simple. Seule une caponnière (2) est maintenue sur le fossé de gorge. Ces coffres de contrescarpe sont reliés à la partie centrale du fort par des galeries souterraines (3) passant sous les fossés.

2-il apparaît une différenciation entre les chambrées de temps de paix (5) restées en maçonnerie et les chambrées de temps de guerre (4) couvertes de béton spécial puis de béton armé. Près des chambrées du temps de guerre se trouvent les cuisines (6). On trouve aussi une entrée de guerre accessible par les fossés en dessous de l'entrée normale.

Le fort a été équipé d'un certain nombre de tourelles et guérites cuirassées :
   . 7- tourelle de 155R mais dont le système de relevage du contrepoids moteur de la tourelle ne sera pas encore installé en 1914.
   . 8- tourelle de 75. Les monte-charges permettant de monter les obus dans la tourelle ne seront pas non plus installés en 1914.
   . 9- tourelles de mitrailleuses.
   .10- guérite et observatoires blindés.

11- de même ont été construites sur la terrasse qui recouvre le casernement, deux casemates de Bourges destinées à protéger les intervalles entre les forts.

12- le fort est aussi équipé d'une usine électrique comportant trois groupes électrogènes, chacun ayant une puissance de 12 KW  produisant du 110 volts pour l’éclairage et la ventilation des casernements. Cependant, l'installation électrique ne sera pas terminée en 1914.

13- les magasins à poudres et ateliers de préparation de l'armement ont été dispersés près des lieux d'utilisation.